Au sortir de l’ère maoïste, l’entrée de la Chine dans une période de réformes et d’ouverture transforme l’ensemble de la société, sphère religieuse comprise, et entraîne le bouddhisme chinois dans une nouvelle phase de développement. Ouvert en 1991 sur le mont Wutai, le jeune temple Pushou s’inscrit dans ce processus. Ce temple, qui se veut représentatif d’une forme de bouddhisme institutionnalisé, abrite la plus large communauté de nonnes bouddhistes chinoises en Chine continentale. Il a fait le choix de se spécialiser dans les domaines de la discipline monastique, de l’éducation, et de la philanthropie, afin de répondre à la fois aux exigences des instances politiques et à celles de la société chinoise post-maoïste. Avec ce temple, mais aussi avec l’ouverture d’un institut d’études bouddhistes, d’un second temple affilié et d’une association caritative, les nonnes témoignent de leurs capacités de négociation, de créativité, de diversification du bouddhisme institutionnel chinois, et s’affirment en tant qu’actrices influentes des sphères religieuses, culturelles, sociales et politiques. Si cet ouvrage s’appuie sur un travail ethnographique, il permet plus largement de s’interroger sur la survie du bouddhisme contemporain face aux politiques sécularistes, ainsi que sur le devenir des nonnes dans un environnement encore dominé institutionnellement et rituellement par les moines. L’auteure donne à découvrir un aspect encore peu connu du bouddhisme est-asiatique : le monachisme féminin, et met en lumière les moyens employés pour légitimer la place des femmes dans un monde bouddhiste à dominante masculine.