Premières lignes :Aujourd’hui, quatre familles monoparentales sur cinq sont constituées d’une mère qui élève seule son ou ses enfants au quotidien, le plus souvent après sa séparation d’avec leur père. Cette prise en charge quotidienne a un coût pour les mères concernées : un coût direct en termes d’entretien des enfants (y compris pour le logement), un coût indirect du fait de la pénalisation de la « maternité solo » sur le marché du travail, un coût en termes de qualité de vie (peu de temps pour soi), etc. Dans quelle mesure l’autre parent, usuellement le père, contribue-t-il à la prise en charge de ce coût, à défaut de partager le travail parental quotidien ?La pension alimentaire, qui prend usuellement la forme d’un transfert monétaire du père vers la mère, est la principale manière, prévue par le Code civil, pour organiser cette contribution. Bien que de nombreuses mères n’en bénéficient pas, c’est un dispositif important, puisqu’il contribue au revenu des mères séparées à hauteur de 18 % du revenu médian qu’elles déclarent en France (Bonnet, Garbinti et Solaz, 2015, p. 3). Dans ce chapitre, l’étude des normes juridiques relatives à la pension alimentaire, articulée avec l’analyse des pratiques professionnelles de fixation et de recouvrement, permet de traiter deux enjeux majeurs relatifs à la monoparentalité : d’une part la division genrée du travail parental – les mères sont structurellement chargées du travail de care mais sont pénalisées professionnellement et économiquement par celui-ci, tandis que les pères sont tendanciellement désignés comme pourvoyeurs, sans toujours assumer ce rôle –, d’autre part les inégalités économiques entre pères et mères, qui contribuent à la paupérisation des familles monoparentales.