Islam et géopolitique en Asie centrale - Sciences Po
N°Spécial De Revue/Special Issue Bulletins de l'Observatoire international du religieux Année : 2024

Islam et géopolitique en Asie centrale

Alain Dieckhoff
Philippe Portier
  • Fonction : Directeur de publication
  • PersonId : 848826

Résumé

L’année 2024 s’achève sur un bilan marqué par l’incertitude et la conflictualité. La guerre en Ukraine se poursuit, Israël continue de mener ses actions contre le Hamas et ses alliés, le HTC (Hayat Tahrir al-Cham - Organisation de Libération du Levant) tente d’établir un pouvoir stable en Syrie et de rassurer l’Occident sur ses intentions. Ces trois conflits sont liés : Bachar el-Assad avait trois principaux alliés dans la région, la Russie d’une part, l’Iran et le Hezbollah libanais d’autre part. Or les forces de Moscou concentrent leurs efforts sur le terrain ukrainien ; Téhéran et le Hezbollah sont quant à eux profondément affaiblis par l’offensive israélienne. La conjonction de ces deux conflits a profité aux forces islamistes du HTC ; leur progression a été particulièrement rapide et le régime de Bachar el-Assad n’a pu tenir au-delà de quelques semaines. Les répercussions de ces conflits sont majeures pour l’ensemble de la région, plus particulièrement pour les pays voisins d’Asie centrale. La guerre civile syrienne, déclenchée en 2011, avait attiré plusieurs milliers de djihadistes et islamistes venus de cette région (Ouzbeks, Tadjiks et Ouighours en tête). Le renversement du régime de Bachar el-Assad pose désormais la question de leur intégration en Syrie ou de leur retour vers leur pays d’origine. Plusieurs défis en découlent : celui de leur éventuelle amnistie (rappelons qu’une loi avait été votée en ce sens au Tadjikistan en 2018) et de celle de leur famille ; celui de leur (ré)-insertion, notamment. C’est sur cette aire que l’Observatoire international du religieux a choisi de consacrer son dernier bulletin de l’année 2024. Il convient de préciser ce que nous entendons par Asie centrale, tant les délimitations de cette aire géographique sont multiples. L’Asie centrale regroupe un premier cercle composé de cinq anciennes républiques soviétiques (Kazakhstan, Kirghizstan, Ouzbékistan, Tadjikistan, Turkménistan), auxquelles s’ajoutent parfois le Xinjiang de Chine, le nord de l’Afghanistan. Un deuxième cercle intègre la Mongolie, le Tibet, le Pakistan et une partie du Caucase[1]. L’Azerbaïdjan est notamment associé à cette région du monde par certains auteurs[2]. Cette délimitation large est celle qui est retenue pour ce nouvel opus. Si cette région regroupe des pays issus pour la plupart d’une URSS caractérisée par son athéisme, elle connaît néanmoins un renouveau de l’islam. Il s’agit alors d’articuler l’héritage soviétique avec l’influence des communautés religieuses qui évoluent en leur sein, tout en répondant aux impératifs politiques propres à chacun de ces États. Les recompositions religieuses ne touchent pas les seules anciennes républiques soviétiques : d’autres pays de la région, tels que le Pakistan, voient leurs équilibres internes se mouvoir ; les rapports de force se modifient. Trois articles composent le dossier thématique de ce nouvel opus. Alix Philippon (Sciences po Aix, MESOPOLIS) propose dans un premier développement une analyse du soufisme au Pakistan, tout en insistant sur la « mosaïque islamique » qui caractérise cet État. Elle montre comment ce courant de l’islam est mobilisé en faveur d’une néo-patrimonialisation du pays. Un deuxième article, rédigé par Altay Goyushov (CERI, Sciences po Paris) porte sur l’Azerbaïdjan ; l’auteur propose un autre angle d’analyse des recompositions politico-religieuses, en insistant sur l’outil que constitue l’enseignement islamique pour l’État pour réduire les ingérences étrangères. Agathe Guy (GSRL, EPHE) s’interroge dans un dernier article sur la production des normes islamiques au sein du Kazakhstan. L’auteure s’intéresse plus particulièrement à deux imams très influents de cet État, notamment sur les réseaux sociaux. L’Éclairage(S) de ce nouveau bulletin est rédigé par Nathalie Caron (Sorbonne université). La spécialiste de la civilisation américaine revient sur l’influence du facteur religieux dans l’élection de Donald Trump à la présidence états-unienne. Elle insiste sur une pertinence moindre du « God gap » confirmée dans le cadre de cette campagne électorale, face notamment à la montée des « nones » outre-Atlantique. Elle souligne néanmoins l’importance de conserver le facteur religieux comme l’une des clés d’analyse des évolutions politico-sociétales de cet État. Enfin, Saimum Parvez (DW Academy Bonn Rein-Sieg University) propose dans la partie Ressource(S) une étude de la constitution du Bangladesh, qui reflète une articulation surprenante entre religion d’État et laïcité.
Fichier non déposé

Dates et versions

hal-04876585 , version 1 (09-01-2025)

Licence

Identifiants

  • HAL Id : hal-04876585 , version 1

Citer

Alain Dieckhoff, Philippe Portier. Islam et géopolitique en Asie centrale. Bulletins de l'Observatoire international du religieux, 52, 2024. ⟨hal-04876585⟩
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